Gilets jaunes : les rails du métro, les sanisettes, les bancs publics et les colonnes Morris, retirés en prévision des dégâts causés par les casseurs, seront remis en place dans la nuit de samedi à dimanche.
La liste des mesures préventives, effectuée par la Mairie de Paris, relative aux dégâts causés par les casseurs qui s’immiscent dans les pacifiques manifestations des Gilets jaunes, n’en finit plus de s’allonger. Après le matériel des chantiers, les abribus, les velib’, les panneaux de signalisation, les pavés, c’est au tour des rails de l’austère métropolitain parisien, du RER, des toilettes publiques et des colonnes Morris d’en faire les frais.
Les casseurs ont encore fait des ravages, mais cette fois sans violence. En prévision de la manifestation de ce samedi, la Mairie de Paris a demandé à la RATP de « retirer, avant l’arrivée des démolisseurs (casseurs, ndlr), tous les rails des lignes 1, 2 et 6 du métro parisien, dans un périmètre de 5 stations autour du métro Charles de Gaulle-Etoile. Sont également affectées par cette décision, inédite dans l’histoire de la politique et dans celle du transport français, les lignes A et C du RER, ainsi que les lignes 3, 8, 9, 11 et 12 du métro.
« Tous les rails, sans exception »
« Cinq stations autour de Charles de Gaulle-Etoile, ils n’auraient pas pu choisir plus de stations ?. Tant qu’à faire. Comme si on n’avait que ça à foutre. On court après les resquilleurs toute la journée et voilà qu’on nous demande de retirer les rails du métro et du RER. C’est provisoire, en plus. Il faudra les remettre en place dans la nuit de samedi à dimanche. Ils sont bien gentils à la Mairie, on les apprécie, mais il y a des limites. Le réseau du métro, c’est pire qu’une pelote de laine. Ça s’enchevêtre de partout. Ces cons de la mairie ont même oublié des lignes dans leur communiqué, tellement c’est emmêlé notre métro. Ils ont omis de préciser qu’il y a aussi les lignes 3, 8, 9, 11 et 12, dans leur périmètre à la con de 5 stations autour de l’Arc de Triomphe. Et j’en oublie sûrement d’autres. Il faut savoir que nous, le personnel de la RATP, on ne connaît pas tous les embranchements et les croisements des lignes de métro. C’est comme pour les taxis. Ils ne connaissent pas tous les noms de rues de Paris. Les VTC, j’en parle même pas. Ils connaissent juste les 2 aéroports d’Ile-de-France et 3 ou 4 monuments touristiques, pas plus généralement. Donc, je disais que ces cons de la mairie ont même oublié des lignes dans leur communiqué. En même temps, c’est normal. Les bobos de la Mairie ne prennent que très rarement le métro. Ils préfèrent circuler à vélo, pour caresser dans le sens du poil les écologistes. Bon, là, on a déboulonné et retiré tous les rails, sans exception, mais je ne suis pas sûr qu’on refera ça chaque semaine, durant toutes les nuits de vendredi à samedi. Si ça continue, on fera grève. Et je n’ai pas besoin de préciser que dans le service public, la grève est un savoir-faire que l’on maîtrise du bout des doigts. On ne va pas s’amuser à attendre leur RIC ou bien faire une pétition qui ne servira à rien. Et puis, ça prendra trop de temps. Nous, à la RATP, on n’aime pas perdre de temps. La preuve, tous nos métros arrivent à l’heure. Tout le monde ne peut pas en dire autant, si vous voyez de qui je parle, sans sarcasme aucun pour notre fainéante camarade de la SNCF », confie avec modestie un sympathique agent de la noble RATP.
« Cela dépasse l’entendement »
Alors que les rails du métro ont été enlevés à 90%, les mythiques colonnes Morris et les très indispensables sanisettes (toilettes publiques, ndlr) ont mis davantage de temps pour être retirées du pollué paysage parisien. Cette mesure est provisoire, « le temps que passe la tornade hebdomadaire » des énervés casseurs, selon la Mairie. Depuis Mai 68, la capitale du romantisme n’a pas connu un tel défilé de camions qui emporte le mobilier urbain en direction des hangars municipaux, situés en banlieue parisienne. « Ecris bien que leurs hangars, c’est pas dans une banlieue huppée qu’ils les stockent. Comme d’habitude, c’est dans nos quartiers qu’ils foutent leur ferraille. C’est pas gentil de leur part à la mairie. Des fois, j’ai envie de leur dire, Paris, Paris, on t’enc*** !, mais mon éducation m’en empêche. Je ne me rabaisserai pas à cela », fait savoir un habitant d’un quartier difficile de banlieue. Il ajoute, « pourquoi vous vous sentez toujours obligés, vous les journalistes, de dire le terme ‘difficile’, quand vous parlez des quartiers de banlieue. Il faut arrêter avec les clichés. Moi, j’ai un diplôme d’une grande école d’ingénieurs et j’ai fondé ma start-up. J’ai réalisé plus de 4 millions d’euros de CA l’an dernier dans le secteur de la high-tech. Il y a des difficultés dans nos quartiers, certes, mais arrêtez avec vos clichés. Vous faites peur aux habitants de Paris intra-muros et aux provinciaux. Quand j’ai des rendez-vous professionnels, mes clients et partenaires d’affaire viennent en gilets pare-balles dans mes bureaux. C’est pas normal, cela dépasse l’entendement ».
« Ici, c’est Paris »
« Chaque colonne Morris pèse 10 tonnes. Mais 10 tonnes au sens propre, pas au figuré. C’était obligé que ça soit lourd, sinon les voleurs à la tire du Trocadéro ou du métro les embarquaient direct. Ils arrivent bien à voler des sous-vêtements de marques sur les piétons, pendant qu’ils les portent sur eux, à même la peau, soit dit en passant. Donc, forcément, c’est pas une colonne Morris ou une toilette publique qui les freineraient. On a dû les souder par précaution, pour être sûrs de les retrouver le lendemain. A Paris, on a les meilleurs en foot, mais aussi les meilleurs pickpockets, malheureusement. On les avait soudés par précaution, pour les retrouver tous les matins à leur place. Une fois, ils ont volé un bus en panne. Ils sont partis avec, et sans le réparer. Ne me demandez pas comment ils ont fait. Même les intellos de la Police scientifique, qui ont chacun 180 de QI en moyenne, cherchent encore à savoir comment les voleurs ont réussi à embarquer un bus, et sans le faire rouler. C’est des piétons qui nous l’ont dit. A Paris, les piétons parisiens, ça parle, mais après l’infraction, rarement pendant, c’est presque de notoriété publique. Par contre les piétons de province, eux, ils interpellent directement les délinquants. Je ne parle même pas des bretons. Les bretons, ils engueulent, avec 2 ou 3 gifles dans la tronche des fauteurs de troubles, pour qu’ils comprennent bien le titre de la soufflante, puis ils emmènent directement au commissariat les fauteurs de trouble. Quand la personne interpellée est en cellule, le breton qui a arrêté le malfaiteur rentre dans la cellule pour une série de 2 ou 3 baffes, pour conclure la conversation. C’est pas par hasard que le village d’Astérix est en Bretagne. Les sympathiques et honnêtes bretons sont sévères, au goût des personnes malhonnêtes, mais ils sont justes et francs. Il ne faut jamais commettre d’acte délictueux devant un breton. Même les politiques d’autres régions, qui sont mutés en Bretagne, ne se risqueraient jamais à un détournement de fonds publics, au moindre faux et usage de faux ou au plus minime des emplois fictifs, c’est connu dans le milieu de la politique. En plus, le taux de rédivice des délinquants est proche de 0 en Bretagne. A part à Rennes, mais c’est normal. Plus la ville est rapprochée de Paris ou de Marseille, plus le taux de récidive augmente. Les corses, eux, c’est différent par rapport aux bretons. Ils sont moins patients, pour résumer. Nos amis corses, eux, ils mettent carrément un bâton de dynamite dans un orifice pris au hasard dans l’anatomie du malfaiteur ou du délinquant qui tente de commettre un délit dans la rue. Les corses ont toujours quelques bâtons de dynamite sur eux, au cas où ça peut servir. Mais je m’éloigne du sujet de l’interview. A la mairie, on essaie d’éviter la politique au maximum. On est comme la Suisse ou le Qatar, on est neutre, ou plutôt, on est avec tout le monde, ou presque. Je dis presque car ceux de FI et du RN, ils ne mettront jamais un seul bulletin de vote dans notre belle ville lumière. Ici, c’est Paris. Par contre, les qataris, eux, ils sont les bienvenus. Ne m’en demandez pas la raison, je n’en sais fichtre rien, et Dieu sait que je suis socialiste. Je suis un vrai socialiste. Pour preuve, j’aime Blum et Jaurès, bien plus que j’aime ma femme, mes enfants, mes parents et mes amis réunis. Au siège du Parti socialiste, ils n’avaient pas compris non plus pour la cession du PSG aux fournisseurs de pétrole, mais uniquement au début. Depuis que l’ancien Maire de Paris, Bertrand Delanoë, leur avait listé les valeurs de la ville lumière, les dirigeants du défunt PS n’ont plus jamais évoqué le sujet depuis. Mais c’est toujours la même chose. Tu m’interroges sur un truc et je me retrouve à parler d’autre chose. C’est sûrement mon côté Parisien intello-Rive gauche, Café de Flore, culture, littérature et politique. Pas comme ces connards de cocos-socialos-hipsters de la Rive droite, avec leurs cocktails détox qu’ils ingurgitent comme on ingurgite des antidépresseurs. Détox, détox, ils n’ont que ce mot à la bouche. A croire qu’ils ont été contaminés à l’Uranium ou au Plutonium. Oui, je sais, j’appelle ceux de la Rive droite socialos alors que la Mairesse de Paris est socialiste, mais elle est au parti juste pour la forme. Franchement, t’as vu les loyers parisiens ?. Tu trouves qu’ils sont socialistes les montants astronomiques des loyers parisiens ?. Tu permets, je te tutoies. Pour l’équivalent de la location d’un 2 pièces à Paris, tu peux louer un 6 pièces dans une petite ville de province comme Toulouse, Nantes, Rennes, Bordeaux, Lille, Saint-Etienne ou Lyon. Mais si, ce sont de toutes petites villes et Lyon aussi en fait partie, avec tout le respect que j’ai pour les bouffeurs de tripes. De toute façon, c’est simple, dès que tu dépasses le périphérique, ce sont de petites villes. Donc, j’en étais où ?. Ah oui, il a fallu dessouder ces colonnes et ces chiottes de mes deux. Et pour trouver un artisan, de mes deux aussi, de disponible de suite à Paris et veille de week-end, de surcroît, autant essayer de trouver les 5 bons numéros et les 2 étoiles de l’Euromillions, t’auras plus de chance. Par contre, pour le transport des colonnes et des chiottes en libre-service, ça va, on a le matériel et le savoir-faire. Il faut dire qu’avec la centaine de voitures, en moyenne, que les casseurs brûlent chaque samedi dans Paris intra-muros, de ce côté-là, on est rodés pour déplacer du métal. L’autre jour, on a même déplacé une dizaine de camions de transport de fonds. Les casseurs avaient cramé des véhicules chargés de liasses de billets neufs de 500 euros. Tout a brûlé, même les billets. Les agents de sécurité ont été obligés de s’enfuir à toute vitesse. Normal, les casseurs, dès qu’ils voient un uniforme, peu importe lequel, ça les excite, politiquement parlant. Au sujet des billets cramés, tu crois que le gouvernement veut retirer de la circulation les billets de 500 balles par caprice ou à cause de la crise ?. Pas du tout. Simplement, les billets de 500 euros, c’est plus cher à imprimer que les billets de 10, 20, 50, 100 ou 200 euros. Les billets de 5 euros, ils sont quasi-gratos à imprimer. Pour 5 euros, t’as plus rien en France. A l’époque, l’UE avait mis en circulation les billets de 500 balles uniquement pour impressionner les américains et les chinois, rien de plus. Il fallait voir la tête des pilleurs quand les casseurs leur avaient raconté qu’ils avaient cramé des tonnes de liasses de billets de 500 euros. Les casseurs, ils ont une sainte horreur du fric, donc ils s’en vantaient. C’est connu, les anarchistes et le pognon, ça fait deux. Les casseurs de droite dure, quant à eux, ils cherchent principalement à s’en prendre à tous ceux qui portent un uniforme. Ils cassent aussi des véhicules sur roues, mais moins que les autres casseurs de gauche, sûrement leur côté capitaliste. Bref, depuis l’épisode des camions plein de billets de 500 euros flambés, les pilleurs sont toujours en train de suivre les casseurs de gauche, au cas où ils voudraient encore brûler des billets. Les pilleurs et le fric, ça fait un, c’est connu aussi », explique un fonctionnaire parisien, chef du département « Dommages causés par les casseurs », créé depuis l’acte 2 des manifestations des pacifiques Gilets jaunes.
« Manque de rigidité, de fermeté et de sévérité »
Par ordre d’importance selon le classement du très sérieux service « Prestige, Notoriété & Promotion économique » de la Mairie de Paris, les touristes, les parisiens, les traders, les designers, les vendeurs de vélos, les personnes travaillant dans la mode, les banquiers, les dirigeants de société, les call-girls de luxe, les hauts cadres, les plombiers, les contrôleurs de gestion, les publicitaires, les franciliens, les employés de bureau, les ouvriers, les Gilets jaunes restés à Paris pour faire du tourisme dominical, les journalistes, les provinciaux, les intermittents du spectacle, les SDF et les mécaniciens auto, pourront à nouveau utiliser le mythique et tant utile métro parisien, dès dimanche matin. Idem pour les sanitaires publics. Quant aux colonnes Morris, inventées par l’imprimeur Gabriel Morris en 1868, des hommes-sandwichs et des femmes-sandwichs, parité oblige, arboreront sur eux des panneaux de réclame, le temps de rapporter des hangars en périphérie de Paris et de ressouder les célèbres décorations métalliques publicitaires . « Ne racontez pas des balivernes, Arschgesicht (face de rectum, ndlr). Les colonnes Morris ont été créées par l’imprimeur germanique Ernst Litfaß (prononcé Litfass en français, ndlr), à Berlin, en 1854. Depuis quand un imprimeur français a-t-il inventé quelque chose ?. Seuls les imprimeurs allemands peuvent faire preuve de créativité et de génie. Les autres imprimeurs, ceux qui sont hors d’Allemagne, ne se contentent que d’imprimer sur leurs machines off-set, de fabrication allemande, soit dit en passant, sans arrogance, avec humilité, malgré notre intelligence, notre technologie et notre rigueur qui nous sont si chères et qui sont mondialement reconnues. D’ailleurs, je vous saurais gré d’appeler ces colonnes, Litfaßsäule ou colonnes Liftass, et non colonnes Morris ou Maurice. Maurice, quel prénom à la con. Ce prénom manque de rigidité, de fermeté et de sévérité. Maurice, cela ne fait pas du tout professionnel », remarque Günther, un renommé Professeur en Histoire de l’imprimerie.
Crédit-photo : Max Pixel, cc0.