Economie

Emploi : sexe, âge, apparence, origines, handicap, les recruteurs devront donner la raison exacte des refus d’embauche.

Une annonce qui devrait mettre du baume au cœur des désespérés et inconsolables demandeurs d’emploi. Les entreprises, qu’elles soient privées ou publiques, devront donner la raison, aussi précise qu’exacte, du refus d’embauche dans les lettres et e-mails de réponse aux offres d’emploi.

Les sempiternels et écœurants « malgré la qualité de votre profil »…

« Au total, j’ai envoyé pas moins de 800 CV et lettres de motivation, rien que le mois dernier. Résultat de tout ça : je suis encore au chomedu. Je comprends que c’est la crise. Par contre, un truc que je n’ai toujours pas pigé, c’est pourquoi je ne suis pas pris. Ces enfoirés (recruteurs et cabinets de recrutement, ndlr) envoient les mêmes modèles de réponse sans dire pourquoi. Dans ta tête, t’es encore plus dans la mouise après qu’avant avoir lu le courrier qui te dit que c’est pas demain la veille que tu seras en CDI, ni même en CDD », se désole un chômeur de longue durée.

Ainsi, les sempiternels et écœurants « malgré la qualité de votre profil » et autres « sans réponse de notre part dans un délai de 2 ans nous supprimons votre CV de nos fichiers » sont désormais caduques. Les entreprises devront justifier « avec exactitude les motifs de non-embauche, sous peine d’amende très salée », prévient un cadre du ministère du Travail.


« La tendresse, ça te ruine une carrière »

Les recruteurs sont hors d’eux. Ils ne comprennent pas cette nouvelle loi « qui va à l’encontre du libéralisme économique prôné par les gouvernements de droite ou de gauche depuis des décennies », selon le chef du département « Plans sociaux & Dividendes » du Medef. « Ces connards veulent de la franchise ?, ils vont en avoir. Nous la leur servirons sur un plateau en or massif 24 carats, de surcroît. Mais qu’ils ne viennent pas chialer. Car j’en vois déjà qui vont pleurer comme des madeleines quand ils sauront qu’ils ne sont même pas appelés à un entretien d’embauche car ils ont 42 ans. Quoi ? C’est vrai ! Ne prenez pas votre air choqué, le scribouillard. Passé 40 balais, on est senior, c’est comme ça, c’est la règle. Pareil pour les salariés qui sont restés 30 ans dans la même boîte. La fidélité est un vilain défaut, c’est une loi dans l’impitoyable monde du travail. Pareil pour les collaborateurs qui changent de boîte tous les 2 ans. L’esprit corporate, c’est primordial, mais avec sobriété. Les demandeurs d’emploi doivent avoir une culture d’entreprise saupoudrée de pulsions de killer-tueur, à tendances destructrices. Les candidats doivent vendre père, mère, conjoint, enfants et chien de compagnie pour pouvoir avoir une chance de se faire embaucher. La tendresse, ça te ruine une carrière », prévient le chef du service déontologie du surpuissant et terrifiant mouvement des patrons.

« J’ai une société à gérer, pas une maternité »

Les recruteurs prennent cette nouvelle mesure avec philosophie. « Personnellement, ça ne m’empêche pas de dormir, mais ma femme, par contre, oui, confie un chef d’entreprise. Elle chiale toute seule la nuit quand elle repense aux candidates et candidats que j’ai éliminé sans raisons logiques et surtout sans raisons humanistes. C’est trop sentimental, les gonzesses. La preuve : ça tombe en cloque tous les ans. C’est la raison pour laquelle j’évite au maximum d’en recruter. J’ai une société à gérer, pas une maternité. Par contre, j’aimerais savoir s’ils donnent une lettre type, ceux qui ont pondu cette loi. »

« Les bronzés, ça me fout les chocottes, c’est plus fort que moi »

Un autre patron ajoute : « Les bronzés, ça me fout les chocottes, c’est plus fort que moi. Pourtant, mon toubib est un bicot, très sympa et professionnel en plus. Pas plus tard qu’hier, quand j’ai proposé à un bougnou… (court silence) Je peux dire bougnoule en interview ou pas ? Bref, un bédouin a passé son entretien. Il a toutes les compétences requises et la motivation nécessaire, mais quand je lui ai proposé une bière, devinez ce qu’il a répondu, l’arbicot ? Il a accepté. Il a voulu me faire croire qu’il est athée. C’est suspect, non ? Ben moi, je l’ai sorti de mon bureau dès qu’il avait fini sa bière. Il y a de quoi, non ? Bon, je dois te laisser. Il y a un bamboula, un niakoué et un bouffeur de pizza qui ont un entretien d’embauche avec moi. Cela serait impoli de ma part de les laisser patienter. »

« Aisément malléables et corvéables à merci »

Le salarié d’une grande entreprise apporte son témoignage : « Nous, notre RH travaille selon son humeur, sans distinction de sexe, d’origines ou d’âge. Si tu le vois emporter les CV et lettres de motivation des candidats aux toilettes, c’est pas bon signe. Il se torche avec quand il est en grognon. Mais s’il les jette minutieusement dans la corbeille, c’est qu’il a passé une bonne nuit. Les ressources humaines, c’est pas facile comme métier », analyse le technicien dans l’industrie.

Une responsable d’un département Ressources humaines a tenu à répondre à ces sauts d’humeur. « Nous sommes les mal-aimés, se désole-t-elle. Nous, on suit les consignes de nos employeurs, c’est tout. Quand le dirigeant veut des nanas avec des grosses poitrines, on peut refuser ? La réponse est non. J’ai un crédit qui me colle au cul. Pareil quand il veut recruter que des jeunes de moins de 25 ans, aisément malléables et corvéables à merci. Les juniors sont en général en location. Forcément, ils ont peur pour leur poste. Les locataires, c’est très craintifs, donc les patrons profitent de cette faiblesse. Mais les gens ont une image de nous qui est négative. On suit les ordres, nous les RH, c’est aussi simple que ça. Si on ne courbe pas l’échine, on devra pointer à Pôle Emploi. »

 

Crédit-photo : pxhere, cc0.

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